La fréquence du diabète ne cesse d’augmenter au Luxembourg, aussi bien chez l’enfant que chez l’adulte. On estime à 6 % la proportion des personnes diabétiques au Luxembourg. La plupart des personnes sont atteintes d’un diabète de type 2 ( insulino résistance ), ce qui correspond à une mauvaise utilisation de l’insuline par l’organisme ou d’un diabète de type 1, caractérisé par un manque absolu d’insuline dans le sang.
L’équipe du service d’endocrinologie pédiatrique du CHL ( DECCP ), autour du Pr Carine de Beaufort, se consacre depuis de nombreuses années non seulement au suivi et à la prise en charge des enfants et adolescents avec un diabète, mais aussi à la recherche afin de mieux comprendre ses causes, mieux le contrôler et peut-être un jour contribuer à une guérison ou prévention de cette maladie. La reconnaissance du travail de l’équipe du DECCP dans le domaine des pathologies rares en gluco-régulation et en endocrinologie lui a valu, en 2018 la nomination comme partenaire ERNENDO, le réseau Européen pour les pathologies rares en endocrinologie.
Cette reconnaissance se base non seulement sur le travail clinique mais également sur le travail de recherche effectué par l’équipe. Ces recherches sont essentielles pour avancer au niveau de la clinique et améliorer le travail de tous les jours.
L’équipe explore plusieurs voies de recherche :
- une évaluation continue de la prise en charge des enfants atteints d’un diabète au Luxembourg afin d’améliorer la prise en charge, la qualité des soins ( Registre SWEET ) ainsi que les résultats à long terme,
- les nouvelles technologies pour améliorer et faci- liter le traitement lourd pour les familles et les jeunes 24h / 24, 7 jours / 7. Ceci inclut l’évaluation des pompes à insuline, des senseurs ( capteurs ) pour mesurer en continu le taux de glucose mais également le pancréas artificiel ( CamAps ),
- la compréhension des causes du diabète,
- l’évaluation des méthodes non invasives ( sans douleur ).
Evaluer la prise en charge existante
Une vision globale de la prise en charge du diabète - SWEET – Better control in Pediatric and adolescent diabetes : working to create centers of reference
Etude SWEET : « Registre européens pour les enfants et adolescents atteints de diabète »
- Promoteur : Diabetes Center for Children and adolescent, Hannover
- Investigateur national : Dr Carine de Beau- fort ( Service diabétologie-endocrinologie pédiatrique )
- Registre – collecte de données
Depuis 2010, le service d’endocrinologie pédiatrique du CHL fait partie du consortium SWEET, qui a pour but d’évaluer la prise en charge des enfants atteints de diabète, et qui inclut des centres sur tous les continents. En donnant leur accord, les parents d’enfants atteints de diabète suivis au CHL autorisaient le recueil et la compilation de certaines des données médicales de leur enfant, tel que l’historique de sa maladie, ses antécédents, l’évolution de son équilibre métabolique ainsi que la nature de son traitement. Plus de 600 parents / enfants ont accepté de participer et les informations qu’ils ont communiquées ont rejoint celles de plus de 80.000 patients inclus dans le registre mondial. ( 3,4,5 ).
L’analyse de ces données a permis une meilleure compréhension des différentes formes de prise en charge du diabète en Europe et l’élaboration de recommandations, présentées aux autorités politiques par le comité directeur du projet, dont fait partie le Dr Michael Witsch du CHL, pour une amélioration de la qualité des soins et de la prise en charge. Le service national d’endocrinologie pédiatrique du CHL, a maintenu la reconnaissance « Centre de référence européen en diabétologie pédiatrique », une reconnaissance de la qualité des soins offerts ainsi que de l’implication sans faille de ses médecins et de l’équipe multidisciplinaire.
Pour travailler à des améliorations.
Utiliser de nouvelles technologies pour mieux maîtriser le diabète chez les jeunes enfants ?
Etude KidsAP : « Le pancréas artificiel chez les jeunes enfants atteints d’un diabète de type 1 ».
- Promoteur : University Cambridge
- Investigateurs nationaux : Pr Dr Carine de Beau- fort, Dr Schierloh ( Service diabétologie - endocri- nologie pédiatrique )
- Etude clinique interventionnelle avec dispositif médical
Le Dr Schierloh a montré que l’on peut obtenir les mêmes valeurs de glucose avec un taux plus bas d’insuline, ce qui confirme que le système du ‘pancréas artificiel’ ressemble plus à la situation chez la personne sans diabète ( 6 ). L’équipe a continué les recherches dans le domaine de nouvelles technologies et le CHL est membre du consortium « KidsAP », projet européen financé par la Commission Européenne dans le cadre de son programme de recherche Horizon 2020 et coordonné par les hôpitaux universitaires de Cambridge.
Pour ce projet, le Dr de Beaufort, le Dr Schierloh et les infirmières de recherche Mmes M Fichelle et D Schaeffer ont proposé à leurs jeunes patients atteints d’un diabète et leur famille de vérifier si leur contrôle glycémique s’améliore avec l’utilisation d’un pancréas artificiel, une application sur un GSM dirigeant l’administration de l’insuline ( via la pompe à insuline ) en temps réel, basé sur des mesures de glucose en continu. La première étude pilote a déjà mis en évidence la faisabilité et l’impact énorme sur la qualité de vie ( 7,8 ). Les résultats de la 2ème étude sont en cours d’analyse, mais semblent bien confirmer l’étude pilote. Le dispositif médical a entretemps reçu le marquage CE, càd que l’on peut l’utiliser en Europe.
Comprendre la maladie
L’étiologie du diabète de type 1 reste une énigme et les traitements immunomodulants n’ont pas pu changer l’évolution.
L’équipe DECCP a participé à l’étude mondiale ( ToReduce IDDM in the Geneti- cally at Risk) . Cette étude a analysé une alimenta- tion sans lait de vache, les premiers 8 mois de vie, chez des personnes à haut risque génétique de développer un diabète. Après un minimum de 10 ans de suivi, on a pu conclure que le lait de vache n’était pas la cause du diabète ( 9 ). En collaboration avec l’équipe du LCSB ( Pr P. Wilmes ), Dr de Beaufort continue ses recherches sur les premières années de vie. Par l’étude COSMIC, on a vu que la colonisation précoce de notre intestin par des milliers de micro-organismes continue à jouer un rôle important ( 10 ).
Pour combiner les forces européennes, l’équipe de DECCP participe à INNODIA et INNODIA HARVEST, deux grands projets Européens ( www. INNODIA.org ), financés par IMI ( Europe - EFPIA private – public partnership ) et des fondations inter- nationales ( JDRF - Helmsley ). Toutes les personnes diagnostiquées avec un diabète de type 1 sont invitées à participer, ainsi que les membres de leur famille de moins de 45 ans. Des bilans exhaustifs standardisés sont faits pendant plusieurs années et les données sont centralisées. Grâce à l’analyses de ces données, on espère initier des traitements ciblés pour arrêter la destruction du pancréas.
Faciliter la recherche en pédiatrie avec des techniques non invasives
Des recherches en pédiatrie sont essentielles, mais des aspects éthiques spécifiques s’appliquent. Dès que des prélèvements sanguins sont nécessaires, des études sans bénéfice direct pour l’enfant sont compliquées. Néanmoins, il est très important d’étudier des phases spécifiques et uniques propres à l’enfant.
Dans ce cadre-là, les Drs Becker et de Beaufort ainsi que leurs partenaires luxembourgeois ont initié deux études afin d’étudier l’utilisation de prélèvements non invasifs ( càd salive, urine, cheveux ) au lieu des prélèvements de sang.
CHARM – Cholesterol in Hair Measurement
L’hypercholestérolémie familiale est une maladie génétique fréquente ( 1 / 250 ). Il s’agit d’une maladie vasculaire sans symptômes, jusqu’au moment où des complications graves au niveau du coeur / cerveau surviennent. Sans traitement, le risque d’un décès précoce est très élevé, mais avec un traitement débuté précocement ( on peut commencer à l’âge de 6 ans ), la durée de vie se normalise. En collaboration avec le Dr Appenzeller ( LIH ) et Dr Borde ( LNS ), Drs Becker et de Beaufort étudient si le cholestérol mesuré dans les cheveux pourrait identifier les enfants atteints d’une hyper-cholestérolémie. Des enfants avec et sans hyper-cholestérolémie sont invités à y participer. Lors d’une prise de sang déjà planifiée, les enfants sont invités à fournir un échantillon de sang supplémentaire et une mèche de cheveux.
Minipuberté
Tous les bébés ( entre 1 et 6 mois présentent une « minipuberté », avec une sécrétion d’hormones sexuelles ( estradiol chez les petites filles et testos- térone chez les petits garçons ), comparable à la puberté. Même si le phénomène de minipuberté est connu depuis des décennies, on ne comprend pas pourquoi cette activation de l’axe gonadotrope se produit et pourquoi il y a des différences importantes de taux d’hormones sexuelles entre les bébés.
Dans sa revue de littérature, Dr Becker discute des rôles potentiels de ce phénomène ( 11 ). Une colla- boration avec le Dr Jäger ( LCSB ) et le Dr Gilson ( CHL ) a été mise en place pour étudier si les hormones sexuelles pourraient être mesurées dans les urines et/ou dans la salive. Le but est d’établir une méthodologie non invasive fiable pour mieux étudier la minipuberté afin de comprendre son rôle. Le recrutement est en cours.
Ce projet de recherche bénéficie d'un financement du Ministère de la Santé dans le cadre du « Programme de recherche clinique hospitalière au Luxembourg ».